Près d’un an après la remise du rapport de la Convention citoyenne sur la fin de vie, la dernière session s’est tenue les 26 et 27 avril, en présence notamment du président de la République, Emmanuel Macron. Plusieurs membres d’ATD Quart Monde ayant participé à cette réflexion étaient présentes. Deux d’entre elles détaillent ce qu’elles retirent de cette expérience, en particulier sur les conditions à mettre en œuvre pour permettre une réelle participation de toutes et tous.
Elles avaient quitté l’hémicycle du Conseil économique, social et environnemental en avril 2023 en pensant qu’elles ne reviendraient pas de sitôt. Mais un an plus tard, les 26 et 27 avril 2024, le président de la République, la ministre du Travail, de la la Santé et des Solidarités, Catherine Vautrin, et la ministre déléguée chargée du Renouveau démocratique, Prisca Thevenot, sont venus à la rencontre des 184 citoyens ayant participé à la Convention citoyenne sur la fin de vie pour une session finale. “Nous étions heureux de nous retrouver”, affirme Françoise Hamel, qui a contribué à ce travail mené pendant un an sur la prise en charge de la souffrance, les soins palliatifs et une éventuelle aide active à mourir.
Militante Quart Monde de Bordeaux, elle est fière d’avoir pu poser une question sur les déserts médicaux à Emmanuel Macron. “Il a répondu sans vraiment répondre. Ils disent qu’ils vont développer les services de soins palliatifs, mais c’est difficile de savoir comment ils vont le faire concrètement dans des régions où il n’y a déjà pas assez de médecins”, constate-t-elle.
“Des modèles pour les parlementaires”
Pour elle, cette expérience a été très enrichissante et elle a eu l’impression de retrouver le 26 avril “comme une famille”. “Nous avons un groupe Whatsapp sur lequel on se partage les articles de presse, on se tient au courant des avancées. Si c’était à refaire, je le referai sans problème”, souligne-t-elle. Les participants à cette session finale ont également pu poser des questions à la présidente de la Commission spéciale pour l’examen du projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie, Agnès Firmin-Le Bodo. “Tous nous ont dit que nous avions très bien travaillé, que nous étions des modèles pour les parlementaires, car nous avions su débattre calmement. C’était agréable”, rapporte Françoise Hamel.
“J’ai eu l’impression qu’ils étaient sincères”, ajoute Pascale (1), proche d’ATD Quart Monde et participante de la Convention citoyenne.“Nous avons réussi à mener ce débat démocratiquement. Nous sommes devenus un exemple dans l’exercice de la démocratie”, poursuit-elle.
Pour Pascale, cela s’explique car le débat était “apolitique”. “La politique, ce n’était pas le sujet. C’est juste parce qu’on est tous concernés par la fin de vie, qu’on soit riche ou pauvre ou de tel ou tel coin de France”, affirme-t-elle. Pascale est fière que cette Convention citoyenne ait permis de “mâcher le travail” aux parlementaires, qui vont maintenant débattre sur le projet de loi.
“Tous dans la même galère”
Elle constate cependant que l’exercice n’a pas été simple et n’est pas tout à fait un modèle de participation de toutes et tous. “À ATD Quart Monde, on a l’habitude de travailler en équipes, en petits groupes. Là, nous étions 184 et personne ne se connaissait. On ne peut pas faire parler tout le monde et certains ne prennent jamais la parole. Le temps de parole n’était pas bien réparti, c’est grand un hémicycle, tu ne vois pas tout le monde. Nous avons un peu été envoyés au casse-pipe. On a participé, c’est déjà pas mal, et on n’a pas travaillé pour rien. Mais est-ce qu’on a été entendus ?”, se demande-t-elle.
À la fin de ce long processus de concertation et de ces deux jours de rencontres avec les ministres et le président de la République, elle remarque que “tout le monde était fatigué” et que ce n’était pas simple d’être “assaillis par les journalistes à la sortie”. “Au départ, on était tous dans la même galère, on ne savait pas ce qu’il allait nous arriver. Que l’on sache bien s’exprimer ou pas, cela a été dur pour tous”, précise-t-elle.
Le principe de la Convention citoyenne était de réunir des citoyens tirés au sort à partir des listes d’abonnés téléphoniques, avec des critères de sélection pour représenter la diversité française. Mais ce système n’avait pas permis de toucher des personnes en situation de grande précarité et le Conseil économique, social et environnemental avait donc fait appel à ATD Quart Monde pour contacter des personnes qui pourraient être intéressées. Huit femmes, militantes Quart Monde ou proches du Mouvement, avaient accepté de participer à la réflexion, en tant que citoyennes et non au nom d’ATD Quart Monde.
Ces difficultés devront être prises en compte lors de la prochaine Convention citoyenne qu’Emmanuel Macron a appelé de ses vœux “d’ici la fin d’année 2024”
Photos : © Katrin Baumann / CESE
(1) Pascale n’a pas souhaité donner son nom de famille.