Début mars 2020, des enseignants d’écoles publiques et privées du Pays de Ploërmel se sont retrouvés pour une seconde matinée d’échange sur le thème “Pauvreté et difficultés scolaires : agir avec les parents”. Quels sont les actions et les “petits pas” possibles pour renforcer les relations enseignants-parents, en particulier avec ceux qui sont le plus en difficultés, afin que chaque enfant se plaise et réussisse à l’école ?
Ils étaient accompagnés par trois membres du Réseau école ATD Quart Monde Grand-Ouest, dont une mère de famille militante à ATD Quart Monde.
Le premier temps d’échange de la matinée était centré sur les prises de conscience, les évolutions de pratiques, les échecs et les réussites depuis la précédente rencontre de février 2019.
“Je comprends mieux l’écart qui existe, pour des familles en grande précarité, entre le monde de l’école et celui de la famille”, dit une enseignante(1). D’autres ajoutent : “Ça m’a permis de mieux imaginer ce que peuvent vivre des parents en précarité et d’être moins jugeant, plus bienveillant”, “j’ai pris conscience que les parents n’ont pas toujours les capacités d’aider leur enfant à faire ses devoirs”, “que l’école n’a pas laissé pour tous les parents un bon souvenir, que certains ont eu des expériences difficiles avec des enseignants”, “prendre conscience des difficultés que des familles rencontrent permet de moins s’énerver devant les imprévus ; d’où l’importance du soutien et des échanges en équipe.”
Ces derniers mois, des enseignants ont fait évoluer certaines pratiques : “J’ai simplifié mon langage, dit l’une, j’utilise moins de termes techniques.” “Maintenant, explique une autre, j’appelle les parents au téléphone avant un rendez-vous pour confirmer. Et je prévois plus qu’un quart d’heure pour le rendez-vous.” D’autres expliquent encore : “en septembre, nous avons fait un petit déjeuner de rentrée plus participatif avec les parents”, “maintenant, je vais à la rencontre des parents au-delà du portail”, “je prévois des temps de rencontre avec les parents avant les réunions institutionnelles”, “un enfant en difficulté scolaire est arrivé en cours d’année. J’ai rencontré la famille avant son arrivée pour créer un lien positif et cela a eu un effet bénéfique pour la suite”, “j’ai mis en place des temps d’ateliers où, sur une ou deux heures, les parents viennent participer dans les classes”. D’autres citent différentes propositions de participation faites aux parents : construction d’une maison des insectes, atelier bricolage de Noël, portes ouvertes, préparation du carnaval, ateliers “intelligences multiples”, “congrès des jeunes chercheurs” , invitation de parents à présenter une passion ou un métier…
Des difficultés fortes demeurent parfois : les faibles moyens de mobilité et l’isolement de certaines familles, le manque de transports publics, des difficultés importantes liées au manque d’emploi pour de plus en plus de parents, des difficultés ou du manque de temps pour se concerter avec des collègues ou des partenaires qui gravitent autour de l’enfant…
La matinée s’est poursuivie avec le témoignage de Vone, militante d’ATD Quart Monde à Rennes, qui a expliqué qu’ayant vécu une scolarité difficile, il lui a fallu trois ans pour oser s’approcher de la grille de l’école de ses enfants. “La maîtresse m’a apprivoisée, dit-elle, en sachant me parler d’autres choses que l’école. C’est important que les parents puissent voir comment ça se passe à l’intérieur de la classe. On voit que nos enfants sont plus responsables et autonomes que ce qu’on imagine souvent.” Ensuite, Vone est devenue “parent-relais” dans l’école de ses enfants, pour soutenir des parents en difficulté dans leur relation avec l’école.
Le dernier temps d’échange de la matinée a consisté à réfléchir en tablées à partir de situations difficiles rencontrées ces derniers mois dans des écoles du territoire.
Parmi les pistes de solutions à expérimenter pour améliorer les relations parents-école : parler en équipe de situations difficiles, tout en respectant l’intimité des familles ; solliciter des parents pour participer à la vie de l’école de diverses manières et mettre en valeur leurs compétences ; trouver une personne (parent d’élève ? personne extérieure à l’école ?) pour accompagner en toute discrétion le(s) parent(s) en difficulté dans des rendez-vous ou des démarches de suivi.
Quelques ressources utilisées ou évoquées lors des deux matinées de formation :
- un diaporama du Réseau école ATD Quart Monde Grand-Ouest sur les relations école-parents
- le jeu du “pas en avant” adapté au sujet des relations entre les parents et l’école
- outils sur la conduite d’entretien – voir par exemple les outils développés par Catherine Hurtig-Delattre
- les actes des ateliers “Grande pauvreté et orientation scolaire” organisés par ATD Quart Monde en 2018
- le livret Astrapi “Stop aux idées fausses sur la pauvreté”
Note
(1) : en termes de priorités à gérer, de codes à respecter pour l’enfant, de la place de l’écrit… L’enseignant peut aussi créer lui-même des conflits de loyauté chez l’enfant en abordant des thèmes comme l’alimentation, le sommeil, les écrans, etc., où ce dernier va comprendre que ce qui se vit à la maison peut être différent de ce qui est dit par l’enseignant.