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Faire participer les habitants ?
Description
Citoyenneté et pouvoir d’agir dans les quartiers populaires.
« Les institutions telles qu’elles fonctionnent aimeraient avoir des interlocuteurs qui leur ressemblent. » La participation évolue entre deux extrêmes : l’injonction participative ou comédie, d’une part, et l’empowerment ou émancipation, d’autre part. En France, le contexte est plus favorable à l’injonction participative.
« La quête de mixité sociale qui justifie la politique de démolition-reconstruction n’a pas été élaborée en réponse à la demande des habitants des quartiers visés, mais pour répondre à l’anxiété du reste de la société ». Cette quête, qui ne peut pas être dite, crée une inégalité dans l’accès à l’information, ce qui fausse la concertation.
L’intervention consistant à faire délibérer des habitants et des agents des services publics encourage la transformation de troubles en des problèmes définis, susceptibles d’être pris en charge par les pouvoirs publics et/ou portés par des mouvements sociaux. Du côté des habitants, elle entraîne une amélioration de l’estime de soi, une meilleure compréhension de la réalité sociale et le désir de dénoncer les injustices. Du côté des responsables, elle permet la construction d’une parole collective d’usagers, l’élaboration d’une critique pertinente des institutions et un diagnostic appuyé sur le vécu des habitants et des agents de base.
L’émergence d’une parole publique et d’une action collective reste cependant soumise à d’importantes conditions :
– Volontarisme politique et clarification des objectifs
– Coproduction de l’enquête sociale dans la durée
– Animation et mise en place de conditions d’égalité et de réciprocité dans l’expression
– Articulation avec les mouvements sociaux
– Lien avec la décision.
Les artisans de la participation – bureaux d’études, consultants ou associations – proposent différentes méthodes qui développent le pouvoir d’agir des plus pauvres et produisent de la confrontation démocratique : atelier de travail urbain, coformation (ATD Quart Monde), théâtre forum etc… Ces méthodes sont caractérisées par une intervention temporaire, une visée d’éducation populaire et de transformation sociale, le rejet des modes traditionnels d’expertise sur la pauvreté ou les politiques sociales et la mise en place de concertation, toujours sur un mode artisanal et réflexif. L’intervenant rend possible la confrontation démocratique entre des individus en situation d’affrontement ou d’évitement, par une organisation de l’espace, du temps et de la parole.
La première étape, décisive, est celle du recrutement des habitants par des discours de conviction (Vous avez quelque chose à dire) ou par des réseaux professionnels et associatifs, ou en proposant une indemnisation. A partir d’histoires personnelles on passe à la confrontation démocratique, à la délibération.
« C’est l’action collective avec les institutions qu’on vise, pas de chercher comment les habitants vont accepter les mesures qu’on souhaite faire passer » (Françoise Ferrand).
La présentation de cas réels, avec beaucoup d’extraits de témoignages, rend cet ouvrage très concret et relativement accessible.
Annick Mellerio
ENS Editions – 2013 – 276 pages
Voir, sur le même sujet : Garantir la concertation.