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- Emploi-Chômage
Le quai de Ouistreham
Description
La journaliste Florence Aubenas s’est immergée durant six mois dans la vie de ceux qui se lèvent tôt pour faire le ménage dans les bureaux ou sur les ferries. Et c’est là un témoignage fort sur le courage quotidien de ceux qui sont rejetés de l’emploi, mais se battent et s’y accrochent quand même : ceux pour qui le travail, « ce n’est pas un emploi, mais des heures ».
Si le reportage souligne la grande confusion qui règne dans l’accueil des demandeurs d’emploi et leur exploitation à outrance au mépris du code du travail, son plus grand mérite est de montrer le courage de ces femmes et de ces hommes de tous âges pour qui la dignité est de travailler.
C’est une réponse magistrale à tous ceux qui ne cessent de répéter que les demandeurs d’emplois sont des assistés. La réplique est cinglante lorsque la journaliste questionne : « A quoi bon tout ce temps de trajet pour deux heures de boulot ? ». « Dis, tu viens d’une autre planète ? ». Tant le désir d’être reconnu pour son travail est vital, est même l’ultime fierté. Être “invisible” aux yeux des autres, de ceux qui ont un emploi mais ne vous voient pas (ou pire vous accusent de mesquinerie) n’est rien à côté du fait de pouvoir se regarder dans la glace ou dans les yeux de ses enfants.
Écrit dans un style alerte, non misérabiliste – on sourit souvent au détour des pages – le livre invite à regarder autrement toutes ces personnes que l’on croise parfois au petit matin, le regard fatigué alors qu’elles rentrent du travail. Dans cette pratique journalistique trop rare, Florence Aubenas n’est en rien elle-même une “héroïne”. Comme hier, de retour de la geôle irakienne ou au sortir du procès d’Outreau, les vrais héros sont ces personnes qu’elle nous fait rencontrer. Et tout l’intérêt du livre, plus encore que de dénoncer des pratiques illégales, est de nous rendre ces personnes proches, en nous incitant à mieux les connaître, voire à les aimer.
Pascal Percq
Éditions Retrouvées – 2016 (réédition) – 265 p.