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- Migrations, Droits de l'homme
Le retour des camps ?
Description
Sangatte, Lampedusa, Guantanamo…
L’institution juridique des camps
L’internement administratif permet d’enfermer un individu sans l’intervention d’un juge ; dans des «zones d’attente» sont ainsi internés des étrangers en attente d’une expulsion ou d’une réponse à une demande d’asile. Ceux-ci disposent de moins de droits qu’un détenu emprisonné : “Aujourd’hui le camp est l’instrument d’une véritable politique d’exception institutionnalisée”. Plus de cent vingt ports, aéroports ou gares sont dotés d’une «zones d’attente».
Les origines coloniales : extension et banalisation d’une mesure d’exception
L’internement administratif, réservé d’abord aux indigènes, prive l’homme de sa liberté et de tous ses droits pour une durée indéterminée. Il a été étendu progressivement à des Européens jugés dangereux par les autorités de leur propre pays. Cette mesure exceptionnelle devient un usage permanent, donnant des pouvoirs excessifs à l’exécutif.
Les mutations de la figure du camp
Apparu avec la première guerre mondiale, le camp devient un moyen efficace de contrôler les populations “à risque”; puis il est banalisé comme prise en charge de réfugiés avant une éventuelle entrée sur le territoire national. Les techniques s’améliorant, les camps sont dispersés, de taille réduite, dans des sites isolés. Pour les associations de défense des étrangers l’enjeu n’est plus seulement le respect du droit de l’individu mais aussi, pour elles, la possibilité d’accéder à ces camps.
“Zones d’attente”, centres de rétention et “libertés policières”
Dans ces lieux, la police a le droit d’agir en dehors de la loi. Dépositaire de la violence légitime de l’État, elle se voit confier une mission d’épuration dont elle doit s’acquitter à l’écart du regard public, en étant couverte et dans une situation de tension où elle doit “faire du chiffre”. C’est la rencontre “d’un corps de répression composé des plus ordinaires des hommes ordinaires, de lieux soustraits au regard public, de groupes stigmatisés et pauvres en droits, de tâches irréalisables et d’obsessions sécuritaires.” La police agira au maximum de sa liberté. Or il faut que l’encadrement reste aux mains de fonctionnaires de la justice, “que les prérogatives policières cessent de s’étendre et d’empiéter sur des domaines qui, jadis, relevaient de la justice, du travail social, etc…” – Entretien avec les auteurs du film “La Blessure”.
De Sangatte aux projets de portails d’immigration
Essai sur une conceptualisation de la “forme-camp”, “lieu des humains surnuméraires”. Il s’agit de “quadriller la foule des non-citoyens ou des exclus en tout genre”. Le camp est sur le territoire sans en posséder le cadre légal. Des camps de refoulement de l’Union européenne sont installés sur les îles Canaries, sur les îles du sud de l’Italie ; d’autres sont en projet en Afrique du Nord – Algérie, Libye, Maroc – et en Europe de l’Est. Aux marges de l’Europe, une construction de l’inacceptable ! D’autres contributions sur le camp dans la guerre contre le terrorisme.
Le Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR) exerce deux métiers : la sélection des exilés et la gestion des camps. Il n’est pas doté par l’ONU mais par les gouvernements nationaux des pays riches. Il “penche clairement du côté du contrôle des flux et du confinement des indésirables, au détriment de la protection des sans-État, sa mission initiale”.
En annexe, une lettre ouverte très percutante du président de la Cimade, “association de solidarité active avec les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile”.
Annick Mellerio
Autrement – Frontières – 2007 – 210 p.