ATD Quart Monde a participé jeudi 29 février 2024 au lancement de la concertation sur le droit à l’emploi, avec treize autres structures. L’objectif est d’élaborer une loi permettant l’accès de toute personne volontaire à un emploi digne.
“Notre projet inverse les logiques : ce n’est pas le manque de volonté des personnes pauvres, privées d’emploi, qu’il faut dénoncer, mais le manque d’emplois décents, adaptés, utiles”, a affirmé Anne-Marie De Pasquale, membre de la délégation nationale d’ATD Quart Monde, à l’occasion du lancement de la concertation sur le droit à l’emploi, à Paris, jeudi 29 février. Avec des membres de treize autres organisations, dont Territoires zéro chômeur de longue durée, le Pacte civique, Emmaüs France, Solidarités nouvelles face au chômage ou encore APF-France handicap, elle participait à une conférence de presse, puis à deux tables rondes, dans les locaux du Centre d’études, de documentation, d’information et d’action sociales (CEDIAS).
Dans le cadre de cette concertation, cinq conférences territoriales vont être organisées au cours de l’année 2024 pour mettre en commun les enjeux et les questionnements. Un espace de contribution est également ouvert sur internet pour permettre à chacun de participer à l’élaboration d’une future loi du droit à l’emploi. “D’autres organisations nous rejoindront, nous avons aussi convié les partenaires sociaux à nous rejoindre pour cet échange. Il y a un intérêt des pouvoirs publics pour ce qu’on est en train de faire”, a affirmé Laurent Grandguillaume, président de Territoires zéro chômeur de longue durée. “Ces échanges visent à nourrir chacun et le collectif pour nous dépasser. De grandes idées nouvelles vont peut-être sortir, on va peut-être ouvrir un nouveau chemin d’espérance par un projet commun. C’est comme ça qu’est né Territoires zéro chômeur de longue durée”, a-t-il rappelé.
Un regard qui stigmatise
Cette initiative doit notamment permettre de lutter contre la stigmatisation des personnes privées durablement d’emploi. “Parler de droit à l’emploi, c’est montrer la forte volonté de travailler des personnes qui subissent la pauvreté. Nul besoin de les forcer à travailler, il suffit juste de créer les conditions pour que ce soit possible pour elles”, a ainsi souligné Anne-Marie De Pasquale. “Le regard qui stigmatise, c’est celui qui veut contraindre les personnes à des contrôles permanents, pour prouver qu’elles cherchent un emploi, alors que les emplois n’existent pas en nombre suffisant. Encore un préjugé. Lorsqu’il n’y a pas assez de place pour tous, alors nous savons que les plus pauvres n’ont aucune chance. Le droit à l’emploi c’est le devoir collectif de créer pour tous ces emplois”, a-t-elle précisé.
“On voit les politiques comme les discours publics qui adorent combattre les pauvres, les précaires et les chômeurs, là où il faut plutôt combattre la pauvreté, la précarité et le chômage”, a ajouté Pierre-Édouard Magnan, président du Mouvement national des chômeurs et précaires.
Il s’agit également de “lutter contre ce regard extrêmement péjoratif que les gens portent déjà sur eux-mêmes, ce désarroi, ce sentiment de culpabilité, de dévalorisation. Nous avons le devoir d’apporter des solutions et chacun peut y contribuer, y compris ceux et celles qui, momentanément ou durablement, sont privés d’emploi”, a précisé Nathalie Hanet, présidente de Solidarités nouvelles face au chômage.
Fédérer toutes les initiatives
Cette concertation doit par ailleurs apporter “des solutions qui ont du sens, pour que l’emploi ait un fort contenu, qu’il permette de créer l’envie de travailler et qu’il réponde aux vrais besoins”, a poursuivi Yann Fradin, vice-président d’Emmaüs France. “Si c’est pour créer de l’emploi qui n’a pas de sens et qui détruit les personnes, c’est catastrophique. Nous voulons un droit à l’emploi qualitatif, porteur d’un changement social”, a-t-il ajouté.
Pour Laurent Pinet, président de la Coorace, réseau national de l’économie sociale et solidaire, les différents partenaires engagés dans cette concertation ont “le devoir d’œuvrer tous ensemble pour fédérer toutes les initiatives, les faire converger dans les territoires, au bénéfice et avec nos concitoyens les plus précaires”, en se basant notamment sur l’exemple de Territoires zéro chômeur de longue durée qui a “bousculé” les logiques et “a fait beaucoup de bien”, a-t-il estimé.
Cette “nouvelle étape d’une construction d’une politique publique par l’action citoyenne”, comme l’a indiqué Jean-Baptiste De Foucauld, co-fondateur du Pacte civique, et les propositions issues de la concertation seront portées auprès du gouvernement et des parlementaires, à la suite d’un événement national de clôture. Julie Clair-Robelet
Photo : Conférence de presse de lancement de la concertation sur le droit à l’emploi, au CEDIAS à Paris, jeudi 20 février 2024. © ATD Quart Monde