Lou Borderie est coordinatrice des projets “jeunesse en Europe” à ATD Quart Monde. Après des études de sciences-politiques, elle s’imaginait ambassadrice ou diplomate. Une expérience sur le terrain au Brésil, à 19 ans, bousculera ce projet et redirigera Lou vers le monde associatif et le volontariat permanent d’ATD Quart Monde.
“Ce que les jeunes veulent c’est que tu les écoutes.” Déterminée et sérieuse, Lou Borderie ambitionne de construire un plaidoyer sur les questions de jeunesse et de grande pauvreté, d’ici mai 2023, avec des jeunes militants Quart Monde, d’origines géographiques variées. En tant que coordinatrice des projets jeunesse en Europe à ATD Quart Monde, Lou organise des rencontres entre jeunes français et étrangers, vivants ou ayant vécu la grande pauvreté, afin d’échanger sur leur histoire.
En juillet, ces derniers se retrouveront tous à Méry-sur-Oise pour une rencontre européenne : “toute la matinée, les jeunes seront mélangés pour échanger sur quatre thèmes, ces discussions iront nourrir l’écrit du plaidoyer”, explique Lou. L’un des objectifs de cette rencontre est de montrer aux jeunes qu’ils ne sont pas seuls à lutter contre la pauvreté et qu’ils sont capables de se présenter devant des institutions pour partager leur réalité et faire changer les choses. L’idée de “co-construire” un projet avec les personnes concernées par la pauvreté réjouit Lou : “lorsque qu’ATD Quart Monde assiste au Forum européen de la jeunesse, l’association parle en leur nom, mais mon rêve, c’est qu’un jour les jeunes viennent aussi pour parler de leur histoire, en utilisant leurs propres mots.”
Devenir ambassadrice ou diplomate
La jeune femme n’avait pas l’ambition, à 18 ans, de travailler dans le milieu associatif. Ce qui l’animait à cette période, c’était le métier d’ambassadrice ou diplomate : “J’ai toujours été très bonne à l’école. Lorsque je suis entrée à Sciences Po, je voulais passer les concours de la fonction publique.” Cependant, lors de sa première année d’étude, une association présente aux étudiants un projet d’échange pédagogique entre la France et la région la plus pauvre du Brésil. Intéressée par ce projet, Lou se rend donc en Amérique du Sud en 2019 : “Cela a été ma première expérience sur le terrain en rapport avec la pauvreté”, se souvient Lou. Au Brésil, elle rencontre une femme qui travaillait au service culture de l’ambassade, à Brasilia : “elle m’a raconté les réalités du métier. Je n’avais pas envie de travailler dans une cage dorée où tout le monde parle français.”
Dès son retour, elle décide de changer de projet pour se destiner au monde associatif, afin de rester “connectée à la réalité”, comme elle l’explique simplement. Lou Borderie garde un fort intérêt pour les pays étrangers. Elle qui parle anglais, espagnol et portugais, garde cependant l’envie de travailler avec des personnes provenant de différents pays et ayant des cultures variées.
Une mission européenne et portée par la jeunesse
Originaire de la classe moyenne, Lou apprend au sein du Mouvement à déconstruire ses préjugés. Ses expériences sur le terrain avec ATD Quart Monde ont été formatrices : “Tu ne déconstruis jamais autant les choses que quand tu vis avec les gens.” Avant d’occuper son poste actuel, Lou réalise un stage, en 2021, pour le Mouvement, pendant lequel elle participe à l’organisation de la Rencontre des engagements. Un évènement qui regroupe 850 personnes pour “parler de nos engagements et comment les faire évoluer dans le monde d’aujourd’hui”, explique Lou. Ces six mois lui ouvrent les yeux sur l’importance de donner la parole aux personnes vivant la grande pauvreté : “c’est une association qui correspond à mes valeurs : faire avec les gens et pas pour”.
Elle décide donc de continuer à s’engager avec ATD Quart Monde et intègre l’équipe Europe en tant que volontaire permanente. Dans ce cadre, elle est notamment chargée du plaidoyer européen autour des questions de jeunesse et grande pauvreté et organise des rencontres entre jeunes pour préparer ce plaidoyer. Une mission mêlant son intérêt pour l’international et son désir de porter la voix des jeunes au sein des institutions. Lors des rencontres, Lou est touchée par la confiance que les jeunes européens acquièrent au fur et à mesure des séjours : “au départ, ils ont peur de ne pas se comprendre, car certains ne parlent pas anglais. Finalement, après quelques jours, ils essayent et réussissent à communiquer”.
Elle aime également se mettre en retrait, afin de laisser les jeunes utiliser leurs propres outils de communication et non seulement les siens, “appris de façon théorique à Sciences Po, où on nous apprend à parler pour les gens“, dit-elle d’un ton légèrement critique. “Avec ATD Quart Monde, on est sur le terrain et on se rend compte que tout le monde est à égalité“, poursuit Lou. Elle qui aime apprendre chaque jour de nouvelles choses, sa mission européenne à ATD Quart Monde lui donne l’occasion d’approfondir ses connaissance des “dimensions cachées de la pauvreté et ses formes variées en fonction des pays.” Aujourd’hui, son engagement pour le Mouvement semble faire sens pour la jeune femme. Lou pense poursuivre son volontariat à ATD Quart Monde au-delà de l’année 2023 et “pourquoi pas au sein d’une branche locale à l’étranger “, dit-elle en arborant un large sourire. Justine Le Pourhiet
Photo : Lou Borderie au Centre national d’ATD Quart Monde, à Montreuil, avril 2022. © Justine Le Pourhiet