Les visages d'Atd Quart Monde :Thierry – “C’est un combat global contre la misère à tous les échelons”

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Les visages d’ATD Quart monde

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Allié dans le Val-d’Oise, Thierry Rochereau a trouvé à ATD Quart Monde “une école” qui l’a construit tout au long de son engagement.

Lorsqu’il est allé à sa première réunion d’information sur ATD Quart Monde, en 1995, Thierry Rochereau n’a rien compris. “À la fin, on était plusieurs à lever la main pour demander : ‘mais, concrètement, qu’est-ce que vous faites ?’”, se souvient-il. Cette rencontre avec le Mouvement attise pourtant la curiosité du jeune Vendéen récemment arrivé à Paris. Il se plonge dans les écrits de Joseph Wresinski et des volontaires permanents et s’engage notamment dans une Bibliothèque de rue du 18e arrondissement.

Passionné par ce qu’il découvre, il décide, en 1997, de démissionner de son travail de statisticien pour s’engager dans le volontariat, dans le Val-d’Oise. Parmi ses nombreuses missions, sa rencontre avec Geneviève de Gaulle Anthonioz, alors présidente d’ATD Quart Monde, le marque profondément. “J’ai vécu une année très riche, mais au bout d’un an, j’ai décidé d’arrêter le volontariat pour retrouver un emploi et fonder une famille. Mais je savais que je conserverais un engagement avec le Mouvement“, explique-t-il.

Donner le goût d’apprendre

Quelques années plus tard, c’est en tant que parent d’élèves qu’il s’investit dans l’école de ses deux enfants, “en essayant de mettre en pratique les valeurs acquises avec le Mouvement”. Avec d’autres parents, il met en place un pédibus : chaque matin, une vingtaine d’enfants partent à l’école primaire à pieds, accompagnés par des parents bénévoles. “Cela permettait à des enfants de régulariser leur présence à l’école ou de ne plus arriver en retard, car certains étaient seuls chez eux le matin. Après 20 minutes de marche tous ensemble, ils arrivaient frais et disponibles pour les apprentissages et ils avaient tissé des liens entre eux”, détaille-t-il.

Dans la continuité de ce projet, une action d’accompagnement à la scolarité autour du jeu se développe. Deux fois par semaine, des bénévoles partagent des moments de jeux et de lecture avec des enfants en difficultés à l’école, dans le cadre d’un partenariat avec l’établissement scolaire et la ludothèque. Des sorties au cinéma et au théâtre sont également organisées. “L’objectif était de donner à ces enfants la curiosité et le goût d’être avec les autres et d’apprendre par le jeu, la lecture et la culture.”

Lorsque ses propres enfants arrivent au collège, Thierry tente, avec d’autres, de créer un espace pour les parents. Ce projet est un échec, dont il tire cependant de nombreux enseignements. “Cette action partait d’en haut, avec les parents d’élèves élus et non avec ceux qui auraient pu être directement concernés. Ce n’était pas possible de réussir ainsi”, explique-t-il avec des regrets dans la voix. Cela renforce alors sa volonté “d’inclure tout le monde dans les actions, malgré les difficultés rencontrées parfois”.

Discrimination pour précarité sociale

En 2007, Thierry s’engage auprès de quatre voisins, Danielle, Philippe, Denise et Johnny, menacés d’expulsion. Co-propriétaires, avec d’autres membres de leur famille, du terrain sur lequel ils possèdent une caravane et une maisonnette, ils doivent faire face à des “agissements complètement sordides” de la part d’un promoteur immobilier, prêt à tout pour obtenir ce bout de terre. Une pétition est lancée dans le quartier, ainsi qu’un comité solidaire pour les droits. Au bout de deux ans, et sous la pression, la famille accepte de vendre le terrain. Immédiatement, les pelleteuses détruisent leurs quelques biens, sous leurs yeux. Pour les reloger, le promoteur fait installer deux caravanes, sans eau ni électricité, à l’orée de la forêt, loin de tout. “Pris à la gorge”, selon leurs mots, Philippe et Danielle décèdent quelques mois plus tard et Denise est hospitalisée.

Plus de 13 ans plus tard, l’émotion submerge encore Thierry lorsqu’il évoque ces événements. “Le combat qu’on a mené m’a permis de réaliser à quel point des personnes peuvent être niées dans leur humanité, lors de leurs contacts avec les services sociaux, municipaux, les élus, le promoteur… C’était absolument terrible. Ils n’ont rien compris au déracinement que cela représentait pour cette famille. J’ai vu la façon dont notre société pouvait rejeter des gens, parfois jusqu’à la mort, par méconnaissance.”

Ce drame a nourri les travaux menés par ATD Quart Monde pour aboutir à la reconnaissance par le Parlement, en 2015, d’un 21e critère de discrimination : la discrimination pour “particulière vulnérabilité résultant de leur situation économique, apparente ou connue de son auteur”. Pour Thierry, cela montre l’étendue de l’action d’ATD Quart Monde : “partir du vécu des familles, pour changer les textes de loi. C’est un combat global contre la misère à tous les échelons”.

Aujourd’hui membre de l’équipe d’animation du Val-d’Oise, il s’emploie à consolider les liens et à recréer une dynamique dans un groupe qui a souffert du départ des volontaires permanents du département et de la crise du Covid. Après 27 ans d’engagement, il a compris le “projet de société” que porte le Mouvement. Mais il admet que cela nécessite du temps et qu’il continue à apprendre. “ATD Quart Monde, c’est une école, qui m’a beaucoup construit, à travers les rencontres, les lectures, les formations… C’est un des rares lieux dans lequel je peux être qui je suis. On se sent libre, libre de son engagement, de penser, de s’exprimer. C’est unique”, conclut-il. Julie Clair-Robelet

Cet article est extrait du Journal d’ATD Quart Monde de décembre 2022.

Photo :  Thierry Rochereau à Pierrelaye le 26 octobre 2022. © JCR, ATD Quart Monde

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