En 2021, 11 millions de personnes sont parties en vacances grâce aux Chèques-Vacances. Partenaire d’ATD Quart Monde, l’Agence nationale pour les Chèques-Vacances milite pour un droit aux vacances effectif pour tous, selon son président, Frédéric Vigouroux et son directeur général, Alain Schmitt.
Qu’est-ce que l’Agence nationale pour les Chèques-Vacances ?
Frédéric Vigouroux : L’ANCV est un établissement public de l’État créé en 1982 et chargé de faciliter les départs en vacances du plus grand nombre de personnes. Les Chèques-Vacances sont des titres de paiement de 10 à 50 euros, permettant de financer des dépenses liées aux vacances et aux loisirs. L’idée de départ était de permettre à l’ensemble des salariés de pouvoir partir en vacances. Très vite, l’ANCV a été amenée à travailler avec des associations, comme ATD Quart Monde et d’autres, pour favoriser le départ de tous. L’ANCV finance ainsi des programmes d’action sociale en faveur des publics les plus éloignés des vacances.
Les Chèques-Vacances ont bénéficié à 4,6 millions de salariés, d’agents publics et de travailleurs indépendants en 2021, soit environ 11 millions de personnes en tout, avec leurs familles. La même année, l’ANCV a soutenu le départ de 187 000 personnes en situation de fragilité, familles en difficulté économique et sociale, seniors isolés, jeunes en insertion, personnes en situation de handicap…
En quoi consiste la convention entre l’ANCV et ATD Quart Monde ?
Alain Schmitt : ATD Quart Monde bénéficie du programme « aide aux projets vacances » de l’ANCV, comme une soixantaine d’autres partenaires. Des membres d’ATD Quart Monde [alliés ou volontaires permanents dans les groupes locaux] construisent des projets avec les personnes et réfléchissent à leur financement. Ils bénéficient ensuite d’un soutien financier de l’ANCV à travers une dotation en chèques-vacances. En 2022, la convention avec ATD Quart Monde prévoyait une dotation de 251 000 euros pour 720 bénéficiaires de Chèques Vacances. Il y en a eu finalement 945. Nous avons largement dépassé l’objectif prévu et le dispositif a connu une hausse de 43 % par rapport à l’année précédente. Pour 2023, nous prévoyons 800 bénéficiaires, mais il n’est pas exclu que la croissance se poursuive sur le même rythme.
Frédéric Vigouroux : Nous nous engageons à trouver des solutions complémentaires pour permettre à ces personnes de partir en vacances. Plusieurs millions de Français ne partent pas en vacances chaque année et nous savons qu’il y a un très gros travail à faire sur cette question. Nous avons besoin de tiers médiateurs pour toucher les publics qui n’ont pas la possibilité de passer par leur comité d’entreprise pour obtenir des Chèques-Vacances. C’est un partenariat social puissant que nous avons avec ATD Quart Monde et d’autres structures, qui nous permet de mailler plus finement le territoire et de favoriser le départ d’environ 210 000 personnes chaque année. En 2023, nous allons mettre l’accent sur les jeunes, pour permettre à un plus grand nombre d’entre eux de partir.
Quels sont les freins aux départs en vacances que vous observez ?
Alain Schmitt : Un tiers de Français ne partent pas en vacances. Cela s’explique par 50 % de motifs financiers et 50 % de motifs non-financiers, liés au travail, à l’état de santé, à des questions culturelles, à des peurs…
Frédéric Vigouroux : C’est pour cela que nous construisons vraiment ensemble le partenariat avec ATD Quart Monde, car nous savons bien que les freins ne sont pas simplement financiers. Il est nécessaire d’accompagner les personnes qui n’ont pas la vie simple. Quand vous ne savez pas comment vous nourrir à la fin du mois, c’est difficile de vous projeter sur un départ en vacances. Nous soutenons aussi ATD Quart Monde dans son plaidoyer pour un véritable droit aux vacances pour tous et dans ses démarches de Croisement des savoirs, notamment avec les professionnels du tourisme qui accueillent les personnes en situation de pauvreté dans leurs établissements.
Qu’apportent selon vous les vacances aux personnes que l’ANCV soutient ?
Frédéric Vigouroux : Après les deux années de Covid, nous avons le sentiment que les gens souhaitent travailler, avoir une vie sociale au travail, mais ils souhaitent aussi avoir des moments de farniente. Les vacances, c’est se donner la capacité de s’organiser dans un monde nouveau, de se reposer, de découvrir des cultures, des paysages, mais aussi les plaisirs de la vie. Dans le climat social actuel, la question du lien social est importante, quelle que soit la situation des gens, que ce soient les salariés, les personnes âgées, les personnes handicapées, les aidants, qui s’occupent tout au long de l’année de leur propre famille et ont besoin à un moment de l’année de souffler…
Alain Schmitt : Les vacances sont un rite collectif, un facteur d’appartenance à la collectivité. Elles peuvent permettre le resserrement des liens familiaux, pour des familles ayant des quotidiens parfois compliqués. Elles sont aussi un facteur de socialisation, notamment pour les personnes âgées isolées. Pour les jeunes, elles peuvent apporter des compétences transférables ensuite au quotidien : organiser un séjour, se confronter à d’autres environnements, préparer un budget… Les vacances sont un vecteur de développement social pour tout le monde.