Chaque année, 90 000 adolescents sortent de l’école prématurément, sans qualification ni diplôme. Pour lutter contre ce phénomène, Eccofor, École de production installée à Dole, dans le Jura, accueille une quinzaine de jeunes en situation de grande précarité ou d’exclusion pour les former à un métier.
“Nous sommes partis de rien il y a un peu plus de 10 ans. Mais nous avions la conviction qu’il fallait trouver une solution pour offrir une formation à des jeunes décrocheurs scolaires et leur faire découvrir un métier”, explique Jean-Yves Millot, directeur d’Eccofor. Cet instituteur découvre en 2011, avec Annie Millot, enseignante, et Claude Chevassu, gérant d’entreprise dans le domaine du pneumatique, le cadre original des Écoles de production. Ensemble, ils créent Eccofor, pour ÉCouter, COmprendre, FORmer.
Aujourd’hui, l’école, avec ses 7 salariés et sa trentaine de bénévoles, accueille chaque année 18 jeunes de 15 à 18 ans. Un peu moins de la moitié sont des jeunes mineurs non accompagnés ou en attente de titre de séjour, arrivés principalement d’Afrique subsaharienne. Les autres, dont certains sont issus de la communauté des gens du voyage, sont en situation de décrochage scolaire dans le système français. L’école propose deux filières de formation, pneus et service, qui permet aux élèves d’obtenir un diplôme délivré par l’Afpa, et métallerie, qui forme les jeunes en deux ou trois ans au CAP de serrurier métallier.
Confiance et coopération
“Nous mettons l’accent sur la confiance et la coopération”, explique Jean-Yves Millot. “Certains élèves mettent parfois 6 mois pour entrer dans une relation de confiance avec un adulte.” À la fois école, où l’on apprend la technique mais aussi le français et les maths, et entreprise qui doit répondre à la commande de clients, Eccofor souhaite également “ouvrir l’esprit des jeunes”. Les élèves participent ainsi chaque semaine à un atelier philo, créent, avec un artiste, des œuvres qu’ils exposent parfois au musée de Dole, apprennent à s’exprimer en assemblée générale… “Pour s’intégrer et vivre dans la société française, il faut avoir une connaissance de soi, de ce qui me nourrit et avoir la capacité d’écouter les autres. Nous leur montrons aussi que, même avec des objets qui devaient être jetés au rebut, comme des bouts de ferraille ou des vieux pneus, on peut faire de belles choses. C’est intéressant de leur montrer qu’ils peuvent être créateurs”, détaille Jean-Yves Millot.
Reconnue par la Fédération nationale des Écoles de production, Eccofor est, depuis 2015, “projet pilote associé” d’ATD Quart Monde. L’école a pour objectif d’intégrer à la rentrée 2020 un nouveau bâtiment, “plus spacieux, qui réunira les deux activités sur un même site”, indique son président, François Foucquart. Elle souhaite également attirer davantage de filles et développera peut-être, dans les prochaines années, une troisième filière d’ouvrier-viticole. L’équipe dirigeante prépare par ailleurs son renouvellement d’ici deux à trois ans et réfléchit d’ores et déjà à la manière de “faire en sorte que les valeurs du début perdurent”. Il s’agit chaque jour d’inventer de nouvelles solutions avec les plus éloignés de la qualification et de l’emploi, pour qu’aucun jeune n’ait plus que l’échec comme seul horizon. Julie Clair-Robelet
Les Écoles de production
Les Écoles de production existent depuis plus de 130 ans. Il y en a aujourd’hui 33 en France qui proposent à des jeunes de 15 à 18 ans des formations qualifiantes. Leur principe est d’apprendre en produisant dans les champs de l’industrie, de la restauration, de l’automobile, des métiers du bois, de la construction, des métiers paysagers et du digital. Les jeunes, accompagnés de leurs enseignants « maîtres professionnels », répondent à des commandes passées par des clients, particuliers ou industriels. Les taux de réussite aux examens sont en moyenne de 90 % et les taux de placement en entreprises avoisinent les 100 %.
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Cet article est extrait du Journal d’ATD Quart Monde de janvier 2020.
Photos : Kara, élève à Eccofor, décembre 2019 © Carmen Martos, ATDQM